Focus sur les Journées du BJCP 2016

La réforme des CCAG, un art de l'exécution

Photo Bertrand DacostaBertrand Dacosta
Conseiller d’État

1) Où en est le projet de loi Sapin II  ?

Le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique poursuit son parcours législatif. Après l’échec de la Commission mixte paritaire, il a fait l’objet d’une nouvelle lecture à l’Assemblée nationale le 29 septembre. Compte tenu de la nécessité d’un examen du texte par le Sénat avant que le dernier mot ne soit laissé à l’Assemblée, puis d’une possible saisine du Conseil constitutionnel, le texte devrait être publié au Journal officiel d’ici la fin de l’année.

On sait que son article 16 (dans la numérotation initiale du texte) habilite le gouvernement à procéder par ordonnance à l’adoption de la partie législative du Code de la commande publique. Cet article a été voté à l’identique par l’Assemblée nationale et par le Sénat, en première lecture. Il n’est donc plus en discussion. Devrait ainsi être levée la « malédiction » qui pèse depuis une vingtaine d’années sur ce code, aucune des tentatives antérieures n’ayant pu aboutir.

Un projet de loi habilitant le gouvernement à l’adopter par ordonnance avait déjà été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale en 1997 ; il avait été néanmoins l’une des victimes collatérales de la dissolution… Une première habilitation avait été effectivement donnée au gouvernement par la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit. Mais la priorité était alors de transposer les directives du 31 mars 2004 dans le cadre d’une nouvelle version du Code des marchés publics, et cette contrainte conduisit à renoncer à utiliser l’habilitation. Une nouvelle habilitation figurait dans le projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés, mais, issu d’un amendement gouvernemental, l’article a été censuré par le Conseil constitutionnel, au motif qu’il était dépourvu de tout lien avec les dispositions du texte… (Décision n°2009-575 DC du 12 février 2009).

Précisons que l’article 16 prévoit une codification à droit constant, mais que cette codification pourra inclure des règles qui résultent, aujourd’hui, de la jurisprudence.

La loi Sapin II comporte également des dispositions ratifiant l’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et celle du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession.

L’occasion a été saisie par le Sénat pour apporter un certain nombre de modifications à l’ordonnance du 23 juillet 2015, dont une partie a été entérinée par l’Assemblée nationale et devrait donc figurer dans le texte définitif. Il s’agit notamment de la suppression de la possibilité d’autoriser les candidats à présenter, dans le cadre d’un marché alloti, des offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus ; de la possibilité pour le candidat de justifier de l’absence de condamnation pénale par une déclaration sur l’honneur ; de l’obligation, lorsque l’acheteur confie la conception d’un ouvrage au titulaire du marché, d’identifier dans le marché une équipe de maîtrise d’œuvre chargée de la conception des ouvrages et du suivi de leur réalisation (faisant écho à des dispositions déjà introduites dans l’ordonnance du 23 juillet 2015 par la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine) et d’une réécriture des dispositions relatives à l’indemnisation du titulaire d’un marché de partenariat en cas d’annulation ou de résiliation de celui-ci par le juge.

L’article 15 permet par ailleurs au gouvernement de prendre par ordonnance des dispositions législatives prévoyant des obligations de publicité et de mise en concurrence pour certaines autorisations d’occupation du domaine public. On se souvient que le Conseil d’État, par sa décision de Section Ville de Paris et Association Paris Jean Bouin du 3 décembre 2010, avait jugé qu’aucun principe non écrit n’imposait aux personnes publiques d’organiser une procédure de publicité préalable à la délivrance d’une autorisation ou à la passation d’un contrat ayant pour seul objet l’occupation d’une dépendance domaniale, même dans le cas où l’occupant est un opérateur sur un marché concurrentiel. C’est donc le législateur qui prend le relai.

2) Quel sera l’agenda 2017 en droit des contrats publics ?

L’année 2017 devrait être une année de consolidation, après un calendrier particulièrement chargé.

Elle verra le lancement des travaux du Code de la commande publique, mais celui-ci, compte tenu du délai d’habilitation (vingt-quatre mois), ne verra pas le jour avant la fin de l’année 2018. Des questions devront être tranchées quant au périmètre précis du code et à l’insertion éventuelle de dispositions législatives (maîtrise d’ouvrage public, sous-traitance, délais de paiement…) qui ne figurent pas aujourd’hui dans les ordonnances de 2015-2016.

Devrait également figurer au menu un décret modificatif du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, afin de tirer les conséquences non seulement des dispositions incluses dans la loi Sapin II, mais aussi de celles figurant dans la loi du 7 juillet 2016, notamment de son article 83 relatif aux concours d’architecture.

Quant à la jurisprudence du Conseil d’État, on peut raisonnablement pronostiquer, là aussi et avec les précautions d’usage, qu’après l’efflorescence des dernières années, elle devrait conduire davantage à préciser le mode d’emploi des innovations récentes, et notamment de la décision Département de Tarn-et-Garonne, qu’à bouleverser des solutions acquises.

Venez faire le point sur une année d’actualité déterminante lors des  Journées du BJCP, le rendez-vous incontournable des professionnels de la commande publique les 7 et 8 décembre à Paris.

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