Covid-19 et marchés publics : comment s’adapter à la crise sanitaire ?

Marchés privés de travaux et commande publique

Au lendemain du discours prononcé par le président de la République, la rédaction vous propose de faire un bilan de l’incidence de la crise sanitaire que nous traversons sur le droit des marchés publics. Alors que nous traversons l’une des pires crises boursières, le ministre de l’Économie et des finances, Bruno Le Maire, a annoncé des mesures de soutien aux entreprises.

Le Covid-19 considéré comme un cas de force majeure ? 

Bruno Le Maire et Agnès Pannier-Runacher ont informé les associations d’élus de l’évolution de la situation, considérant que le virus covid-19 constituait un cas de force majeure dans le cadre de l’exécution des marchés publics de l’État et incitant les élus locaux à adopter la même attitude vis-à-vis des titulaires des marchés publics.

Le gouvernement, par la voix de ses ministres, a suggéré aux acheteurs publics de ne pas appliquer les pénalités de retard incombant aux entreprises victimes de difficultés d’approvisionnement en provenance de la Chine.

Les administrations concernées sont appelées à invoquer la force majeure pour suspendre l’exécution des marchés publics en cause.

Renaud Muselier, président de Régions de France, incitait, dès le début du mois, les régions à supporter les entreprises, afin de faire face au choc qui s’abattait sur l’économie locale. L’association préconisait alors, dans un souci de solidarité, de ne pas appliquer les pénalités prévues au contrat lorsque l’entreprise touchée était confrontée à des difficultés imputables à l’épidémie de coronavirus.

La force majeure, ses conditions et ses effets

Pour faire jouer la force majeure, chaque titulaire doit prouver qu’il fait face à une difficulté imprévisible, extérieure aux parties et insurmontable. Ces conditions rendent les obligations contractuelles du fournisseur impossibles à exécuter et lui permettent d’échapper à l’application de pénalités ou d’une demande indemnitaire.

La force majeure permettrait également de fonder le recours du titulaire contre la décision de résiliation pour inexécution du pouvoir adjudicateur.

Attention, l’acheteur est en droit au nom de l’article L 2195-2 du code de la commande publique de « résilier le marché en cas de force majeure ». L’article L 6 du code de la commande publique met en exergue le fait que « L’autorité contractante peut résilier unilatéralement le contrat dans les conditions prévues par le présent code. Lorsque la résiliation intervient pour un motif d’intérêt général, le cocontractant a droit à une indemnisation, sous réserve des stipulations du contrat. »

Épidémie et force majeure

Selon la jurisprudence en vigueur, pour que la force majeure en cas d’épidémie soit retenue, il faut que les conditions suivantes soient réunies : il faut que le contrat soit conclu postérieurement à l’épidémie (TGI Saint-Denis de la Réunion, 29 décembre 2009, n°08/02114), l’épidémie doit atteindre la zone d’exécution du contrat, l’épidémie doit être suffisamment grave pour obtenir le qualificatif d’irréversible (CA Basse-Terre, 17 décembre 2018, n°17/00739).

La jurisprudence est assez rigoureuse concernant le caractère de force majeure des épidémies. La qualification se fera donc au cas par cas.

Que faire si la force majeure n’est pas retenue ?

Si la force majeure ne peut être retenue et si la prestation est dégradée, il sera possible d’invoquer l’imprévision. En outre, si les conditions d’exécution du contrat ou la substance du contrat en elle-même sont modifiées, on pourra invoquer la théorie du « fait du prince ».

Tout contrat possédant des clauses de renégociation pourra être modifié.

 


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