Procédure de passation

BJCPonline : Brèves de jurisprudence

La sélection du mois
Les dernières décisions résumées par la rédaction du BJCPonline.

MARCHÉS PUBLICS

CE 3 avril 2024, CHU Alpes-Isère c/ SCI Victor Hugo 21, n° 472476, A.

Dans son arrêt rendu le 3 avril dernier, le Conseil d’État a examiné le litige entre le centre hospitalier Alpes-Isère et la société civile immobilière Victor Hugo 21 concernant un contrat de « bail en l’état futur d’achèvement » conclu en août 2017. Le centre hospitalier avait demandé l’annulation ou la résiliation du contrat devant le tribunal administratif de Grenoble, contestant notamment l’option d’achat prévue. La cour administrative d’appel de Marseille a annulé le contrat, considérant qu’il s’agissait d’un marché public de travaux au sens des dispositions légales. Cette décision a été confirmée par le Conseil d’État, qui a également souligné l’illégalité de la clause de paiement différé dans les marchés publics des établissements publics de santé. Le Conseil d’État a jugé que le contrat était entaché d’un vice suffisamment grave pour justifier son annulation, en rejetant le pourvoi de la société Victor Hugo 21.

Les brèves de la revue BJCP
L’actualité jurisprudentielle du droit des contrats publics sélectionnée par le comité de rédaction du BJCP.

LÉGATIONS DE SERVICE PUBLIC

CE 13 octobre 2023, M. Carré et Collectif alétois gestion publique de l’eau actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois, n° 464955

Quelle est l’étendue de l’information des conseillers municipaux sur une délibération concernant une convention de délégation de service public ? La trop brève durée d’une DSP est-elle un moyen opérant ?

Procédure de passation Information des conseillers municipaux sur une délibération concernant une délégation de service public 1. Régime a) Obligation de mettre à même les conseillers municipaux de consulter le projet de contrat et les pièces du dossier, par une information appropriée, 15 jours au moins avant la délibération Existence b) Obligation de notifier ces pièces à chacun des membres du conseil Absence 2. Nature Garantie au sens de la jurisprudence Danthony Durée des DSP Durée trop brève Moyen opérant.

Il résulte de la combinaison des articles L. 1411- 4, L. 1411-5, L. 1411-7 et L. 2121-2 du code général des collectivités territoriales que dans les communes de 3 500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d’une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l’ordre du jour. Le défaut d’envoi de cette note ou son insuffisance entache d’irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n’ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d’une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l’importance des affaires, doit permettre aux intéressés d’appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Lorsque la délibération concerne une convention de délégation de service public, tout conseiller municipal doit être mis à même, par une information appropriée, quinze jours au moins avant la délibération, de consulter le projet de contrat accompagné de l’ensemble des pièces, notamment les rapports du maire et de la commission de délégation de service public, sans que le maire ne soit tenu de notifier ces mêmes pièces à chacun des membres du conseil municipal. L’information adéquate de l’ensemble des membres d’une assemblée délibérante, afin qu’ils puissent exercer utilement leur mandat, constitue, en principe, une garantie pour les intéressés au sens de la jurisprudence Danthony.

CONTENTIEUX DES CONTRATS PUBLICS

CE 27 septembre 2023, Société des autoroutes du sud de la France, n° 470331

Une prise de position de l’Autorité de régulation des transports sur la légalité d’un avenant à une concession d’autoroutes et sur la loi applicable est-elle susceptible de recours ?

Procédure Recevabilité Absence Prise de position de l’ART sur la légalité d’un avenant à un contrat de concession et sur la loi applicable.

Société autoroutière demandant l’annulation pour excès de pouvoir d’un avis rendu public par lequel l’Autorité de régulation des transports a, d’une part, estimé que l’avenant à un contrat de concession d’autoroutes conclu entre l’État et cette même société et le décret l’approuvant étaient illégaux faute qu’ait été recueilli au préalable son avis et, d’autre part, exprimé des doutes sur la légalité de certaines stipulations de cet avenant. D’une part, la position prise par l’autorité sur la portée exacte de l’obligation, faite au Gouvernement, de la consulter, en vertu de l’article L. 122-8 du code de la voirie routière, ne peut être regardée comme ayant par elle-même un effet notable sur l’autorité chargée de mettre en œuvre cet article. D’autre part, si la société requérante soutient que l’avis rendu sur l’avenant litigieux en ce qu’il conclut à l’illégalité de cet avenant en raison de l’absence de consultation de l’autorité et à l’existence de doutes sérieux sur la légalité de certaines de ses stipulations emporterait des effets notables, en particulier en ce qu’il affecterait sa situation ou celle d’autres sociétés concessionnaires d’autoroutes, elle ne produit à l’appui de ces allégations que des articles de presse faisant état de la position de l’Autorité, ne fournissant notamment aucun élément sur la dégradation actuelle ou probable de sa situation financière. Par suite, les conclusions de la requête tendant à l’annulation de cet avis sont irrecevables.

CE 17 octobre 2023, Société Ryanair Designated Activity Company et Société Airport Marketing Services Limited, n° 465761

À quelles conditions l’exécution forcée d’une sentence arbitrale peut-elle être accordée par le juge administratif ?

Arbitrage Arbitrage international Sentence arbitrale rendue dans le cadre de l’application d’un contrat conclu entre une personne morale de droit public française et une personne de droit étranger, exécuté sur le territoire français, mais mettant en jeu les intérêts du commerce international Demande d’exequatur de la sentence arbitrale 1. Prohibition de principe de l’arbitrage Conséquence de l’inarbitrabilité du litige n Rejet de la demande d’exequatur Absence d’incidence de la Convention de New York du 10 juin 1958 2. Arbitrabilité du litige Convention de Genève du 21 avril 1961 (art. I et II) Champ d’application Exclusion Convention d’arbitrage dont une des parties n’est pas sise dans un des États parties à ce traité Conséquence Absence de dérogation au principe de prohibition de l’arbitrage pour les personnes publiques.

L’exécution forcée d’une sentence arbitrale rendue dans le cadre de l’application d’un contrat conclu entre une personne morale de droit public française et une personne de droit étranger, exécuté sur le territoire français mais mettant en jeu les intérêts du commerce international, ne saurait être autorisée par le juge administratif, par une exequatur, si elle est contraire à l’ordre public.