La sélection du mois
Les dernières décisions résumées par la rédaction du BJCPonline.
CONTENTIEUX DES CONTRATS PUBLICS
CE 27 novembre 2023, Société SNCF Voyageurs, n°462445, B.
Dans cet arrêt rendu le 27 novembre dernier par le Conseil d’État et publié aux tables du Recueil, il était question de l’annulation irrégulière d’un contrat administratif et du caractère d’ordre public d’un moyen en cause d’appel. La haute juridiction administrative rappelle que saisi de conclusions relatives à l’exécution d’un contrat administratif, le juge de premier ressort ne peut aucunement prononcer l’annulation du contrat. Bien plus, la cour administrative d’appel doit relever d’office, par la suite, la méconnaissance par le tribunal administratif de son office de juge de l’exécution des contrats.
Les brèves de la revue BJCP
L’actualité jurisprudentielle du droit des contrats publics sélectionnée par le comité de rédaction du BJCP.
THÉORIE GÉNÉRALE DES CONTRATS
CE 12 avril 2023, Société Art & Build Architectes, n° 461576
Les pénalités de retard infligées à l’un ndes membres d’un groupement solidaire sont-elles individualisables ?
Exécution du contrat – Pénalités de retard – Pouvoir de modulation du juge administratif – Groupement solidaire – Individualisation des pénalités au regard de la part de marché revenant à chaque membre – Condition de la présence d’une convention à laquelle le maître d’ouvrage est partie.
Lorsqu’une convention, à laquelle le maître d’ouvrage est partie, fixe la part qui revient à chaque membre d’un groupement solidaire dans l’exécution d’une prestation, et lorsque le juge est saisi par l’un de ces membres de conclusions tendant à ce que soient modérées les pénalités mises à sa charge en raison des retards dans l’exécution de la part des prestations dont il avait la charge, il appartient au juge, pour apprécier leur caractère manifestement excessif eu égard au montant du marché, de prendre en compte la seule part de ce marché qui lui est attribuée en application de cette convention.
MARCHÉS PUBLICS
CE 5 avril 2023, Ministre des Armées c/ Société Iveco France, n° 463554
Quelles sont les obligations, à la charge de l’administration, résultant de la conclusion d’un marché de substitution ?
Exécution technique – Résiliation – Résiliation aux frais et risques – Conclusion par le pouvoir adjudicateur d’un marché de substitution – Droit de suivi du titulaire du marché résilié – Portée – Notification du marché de substitution – pièces justifiant de la réalité des prestations effectuées – Existence, à condition d’avoir saisi l’administration d’une demande en ce sens.
Contentieux des contrats publics – Contentieux contractuel – Marché de substitution – Contestation par le cocontractant initial des sommes mises à sa charge au titre du marché de substitution – Recours Tarn-et-Garonne – Moyen opérant – Absence – Irrégularité de la passation du marché de substitution.
Il résulte des règles générales applicables aux contrats administratifs que l’administration peut, après avoir vainement mis en demeure son cocontractant de poursuivre l’exécution des prestationsqu’il s’est engagé à réaliser conformément aux stipulations du contrat, décider de confier l’achèvement des prestations à une autre entreprise aux frais et risques de son cocontractant. Le cocontractant défaillant doit être mis à même de suivre l’exécution du marché de substitution ainsi conclu afin de lui permettre de veiller à la sauvegarde de ses intérêts dès lors que les surcoûts supportés par l’administration à raison de ce marché sont à sa charge. À cet effet, si l’administration doit, dans tous les cas, notifier le marché de substitution au titulaire du marché résilié, elle n’est tenue de lui communiquer les pièces justifiant de la réalité des prestations effectuées en exécution du nouveau contrat qu’à la condition d’être saisie d’une demande en ce sens. Le cocontractant défaillant de l’administration ne saurait utilement soutenir, à l’appui de sa contestation des sommes mises à sa charge à raison du marché de substitution, que ce marché aurait été attribué en méconnaissance du principe d’égalité de traitement entre les candidats à un contrat de la commande publique.
CE 1er juin 2023, Centre hospitalier de Capesterre-Belle-Eau, n° 462211
Comment récupérer les avances faites à un sous-traitant après la résiliation du marché ?
1.Exécution technique – Résiliation – Récupération des avances – Possibilité de récupération des avances auprès du titulaire du marché et des sous-traitants sous réserve des dépenses exposées par eux – 2. Modalités – S’agissant des avances perçues par le titulaire du marché, nécessité de l’établissement du décompte général et définitif prévu au contrat – S’agissant des avances perçues par les sous-traitants, obligation pour la personne publique de consulter le titulaire sur l’étendue de leurs prestations mais pas d’obligation d’établir un décompte – 3. Recours possible du sous-traitant contre le titulaire du marché si celui-ci a été résilié pour faute.
- Il résulte des dispositions du code de la commande publique, reprenant celles du code des marchés publics, que lorsque le marché est résilié avant que l’avance puisse être remboursée par précompte sur les prestations dues, le maître d’ouvrage peut obtenir le remboursement de l’avance versée au titulaire du marché ou à son sous-traitant sous réserve des dépenses qu’ils ont exposées et qui correspondent à des prestations réalisées conformément au marché. S’agissant toutefois des prestations réalisées par le sous-traitant, il appartient au maître d’ouvrage de consulter le titulaire du marché pour s’assurer que ces conditions sont remplies.
- L’exigibilité de la créance que détient le maître d’ouvrage sur le sous-traitant au titre de l’avance versée n’est pas subordonnée à l’établissement du décompte général et définitif contractuellement prévu puisque le maître de l’ouvrage et le sous-traitant ne sont pas liés par le marché. En revanche, s’agissant de la créance détenue par le maître de l’ouvrage sur le titulaire du marché au titre de l’avance versée à ce dernier, elle ne saurait présenter un caractère certain et exigible et, par suite, faire l’objet d’un titre exécutoire en l’absence du décompte général et définitif prévu au marché.
- En cas de résiliation pour faute du marché, le remboursement de l’avance par le sous-traitant ne fait pas obstacle à ce que celui-ci engage une action contre le titulaire du marché pour obtenir réparation du préjudice que cette résiliation lui a causé à raison des dépenses engagées en vue de l’exécution de prestations prévues initialement au marché.